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Renforcer la compétitivité du bétail ruminant endémique (BRE) à travers la labellisation et l’exploitation de créneaux de marchés de niche
Les politiques de protection permettent de conserver des ressources biologiques telles que les espèces et races animales, à l’exemple du bétail ruminant endémique (BRE) et de maintenir la biodiversité. Souvent ces politiques comportent un ensemble de mesures et démarches concourant à cet objectif. Parmi celles-ci, figurent la mise sous label des divers produits issus du BRE et la mise en œuvre d’actions visant leur promotion (certification d’élevages bio, identification de promoteurs de créneaux d’exportation de chèvres naines, etc.).
Les foires, un outil de valorisation des produits du BRE
L’expérience a montré l’importance des foires pour faire connaître les produits (par exemple, la foire internationale de l’agriculture et des ressources animales (FIARA), régulièrement organisée au Sénégal). Il convient de fixer une périodicité d’organisation de foires et concours d’exposition qui figureraient dans l’agenda des agriculteurs et éleveurs et autres acteurs de la zone du bétail ruminant endémique. Il s’agit de les organiser à deux niveaux : des foires nationales dans les sites du PROGEBE et des foires sous-régionales tournantes avec les exposants en provenance des pays pouvant échanger leurs différentes expériences et leurs produits. Les foires permettent de connaître des individus ayant des caractéristiques intéressantes et qui peuvent servir dans des programmes de sélection de la race. Un autre intérêt des foires est qu’elles constituent des espaces possibles d’exposition des inventions et innovations de valorisation. La région connaît une certaine tradition d’organisation de foires pour promouvoir les produits de l’élevage ; ainsi, en plus des participations à la FIDAK (Foire Internationale de Dakar) et à la FIARA (Foire Internationale de l’Agriculture et des Ressources Animales), l’on a pu en compter en :
2000 : foire d’exposition des produits agricoles et agro-alimentaires organisée par DYNA à Kolda ;
2001 : foire d’exposition des produits agricoles et agro-alimentaires organisée par DYNA à Tambacounda ;
2002 : foire d’exposition des produits agricoles et agro-alimentaires organisée par DYNA à Ziguinchor ;
2005 : foire sous régionale de l’élevage de Kolda organisée par les MDE et DIRFEL de Kolda et Tambacounda du 2 au 5 mars 2005 à Vélingara ;
2007 : deuxième édition de la foire régionale de l’élevage de Kolda du 22 au 25 novembre 2007 à Kolda ayant attiré plus de 1500 personnes avec la participation d’acteurs de l’élevage du Sénégal et de la sous-région ouest-africaine (délégations de la Guinée-Bissau, de la Gambie, du Bénin, de la Guinée Conakry, du Mali et du Togo) : échanges et expositions.
La principale critique adressée est qu’en raison de l’importance des budgets engagés pour leur organisation (environ 20 millions de FCFA) et que ne détiennent pas souvent les organisations des éleveurs, leur régularité est hypothétique. Ainsi, l’on pourrait créer une fondation propre au bétail ruminant endémique qui pourrait assurer de façon durable le financement de ces foires.
D’autre part, considérant que les populations élevant le bétail ruminant endémique sont en même temps agriculteurs, l’on pourrait promouvoir parmi ceux-ci des pratiques reposant sur le principe de l’agriculture biologique sensu lato. A ce sujet, un groupe d’éleveurs pourrait être promu à pratiquer l’élevage biologique du bétail ruminant endémique en se conformant au cahier des charges de l’élevage biologique, visant des marchés porteurs pour un certain nombre de produits d’exportation (animaux sur pied, viande, fromage, huile de beurre) ou bien cibler un certain nombre de produits végétaux biologiques dont les itinéraires techniques mettent à contribution le bétail par l’énergie et la matière organique produite.
La labellisation pour renforcer la compétitivités des produits du BRE
Finalement, une autre forme de valorisation du bétail ruminant endémique consiste à en inscrire les produits dans une démarche de labellisation. Ainsi, la démarche AOC est souvent la seule à pouvoir maintenir une production dans des régions difficiles ; elle est source de valeur ajoutée en créant des emplois. Facteur de développement rural et d’aménagement du territoire en générant des activités économiques multiples et diversifiées, l’appellation d’origine, qui échappe à la loi des économies d’échelle, permet le développement économique de zones défavorisées. Ce type de production permet aux agricultures difficilement compétitives de se démarquer du système concurrentiel des filières agroalimentaires classiques en les orientant vers des productions spécifiques de qualité. Il favorise une haute valorisation de la matière première, mieux adaptée aux exploitations qui ont des volumes de productions bien inférieurs à celles des zones intensives.
L’objectif de l’AOC consiste, en parvenant à l’excellence, à dégager une plus value à tous les niveaux de la filière, en termes de prix du produit, de revenus pour le producteur, de rentabilité pour les entreprises de transformation et d’emplois induits. Le défi, c’est de garder la typicité du produit, son originalité, sans pour autant négliger les améliorations possibles, surtout si ces progrès améliorant la qualité de leurs conditions de production vont dans le sens du renforcement du lien avec leur terroir : alimentation du bétail, promotion de races de vaches locales même si elles sont moins performantes, limitation de la production annuelle de lait, ou encore conditions de transformation plus précises pour assurer une meilleure typicité au produit. Une gamme de produits pourrait ainsi être promue comme le lait ou le fromage de Ndama, la viande, le cuir ou la peau, etc. (Par exemple, au Bas – Congo, RDC, où la Ndama est introduite depuis 1920, l’excellence du cuir est appréciée et il bénéficie d’une appellation courante de « vachette de Guinée »). La reconnaissance en appellation d’origine implique une démarche et une discipline collectives qui reposent sur la détermination et la volonté des professionnels concernés de produire et promouvoir un produit original et de qualité. Chaque acteur de la filière est coresponsable du produit. A l’origine de cette démarche, les syndicats de défense de chaque AOC qui regroupent les acteurs autour d’un produit. Unis autour d’un produit dont ils sont fiers, les syndicats sont engagés dans une réflexion permanente pour améliorer les conditions de production, différencier leur appellation et en renforcer l’identité.
Du dynamisme du syndicat dépend l’avenir de l’appellation. La difficulté majeure à sa réalisation pour des pays comme le Sénégal, c’est l’insuffisance de textes légaux pouvant lui définir un cadre juridique devant en réglementer les procédures. A ce titre, nous recommandons des actions de sensibilisation, de plaidoyer et de lobbying devant aboutir à combler le vide.
Facteurs de réussite :
Vaste campagne de sensibilisation concertée pour une plus grande visibilité : médiatisation des actions et situations (presse, radios rurales, télévision) ;
Confection de supports variés de diffusion de slogans porteurs (T-shirts, casquettes, agendas, calendriers, dépliants, etc.) ;
Lobbying et plaidoyer auprès de leaders d’opinion et de personnalités politiques et artistiques ;
Haute fréquence de tenue médiatisée de foires et salons d’exposition.
Source : Projet régional de gestion durable du bétail ruminant endémique (PROGEBE). Rapport de présentation d’innovations techniques, institutionnelles et commerciales ayant un potentiel d’amélioration sur la gestion et l’exploitation du bétail ruminant endémique dans les sites du PROGEBE – Sénégal. Préparé par Aladji Diack, Consultant. 21 janvier 2011