Abonnement à Agridape

Accueil / Publications / AGRIDAPE / Chaînes de valeur et nouveaux marchés agricoles émergents / Systèmes de commercialisation et chaine de valeur de l’oignon au (...)

Systèmes de commercialisation et chaine de valeur de l’oignon au Niger

Depuis plus de cinq décennies, la production
d’oignon a connu une hausse spectaculaire
au Niger.

Importance économique de la culture de l’oignon

Depuis plus de cinq décennies, la production d’oignon a connu une hausse spectaculaire au Niger. Avec une production annuelle passée de 170 000 tonnes dans les années 90 à près 500 000 tonnes de nos jours, le pays occupe la deuxième place au rang des plus grands producteurs d’oignon d’Afrique de l’Ouest et s’arroge la place du plus grand exportateur de la sous-région. L’oignon nigérien, réputé de grande qualité, jouit d’un avantage commercial considérable dans les marchés locaux et sous-régionaux. « Le violet de Galmi », Le plus célèbre des oignons ouest africains est particulièrement apprécié pour son goût épicé et ses qualités à la cuisson.

La filière qui concentre plus d’un million d’acteurs est l’un des principaux piliers économiques du Niger. « L’or violet », (surnom donné à l’oignon nigérien du fait de sa forte contribution au PIB national), a rapporté 22 milliards FCFA à l’économie nationale en 2012.

L’oignon est cultivé dans toutes les régions du Niger où les conditions pédoclimatiques le permettent, avec des superficies et des productions variables d’une région à une autre.

A l’échelle locale, la culture d’oignon constitue une source importante de revenus et contribue à la sécurité alimentaire et financière des producteurs. L’oignon est souvent la plus grande source de revenus monétaires et permet de faire face aux besoins des familles. La culture de l’oignon, étant une activité de contre-saison, contribue, par ailleurs, à atténuer le phénomène de l’exode rural dans les grands bassins de production. La rentabilité financière de l’oignon incite beaucoup de paysans à rester au village plutôt que d’aller gonfler les rangs de chômeurs urbains à la fin de l’hivernage.

Les acteurs de la chaine de valeur : une multitude de parties prenantes

Le secteur de l’oignon est régi par un grand nombre d’acteurs qu’on peut classer en quatre sous-groupes : Les opérateurs de la chaîne de valeur ; les supporters de la chaîne ; des acteurs institutionnels et des intervenants et facilitateurs externes.

  • Les opérateurs de la chaîne de valeur sont ceux qui produisent, achètent, vendent ou transforment l’oignon. A un moment ils sont propriétaires du produit. Ce groupe d’acteurs concerne les producteurs, les producteurs-intermédiaires et producteurs-commerçants, les commerçants, les transformateurs et les grossistes et détaillants d’oignon.
  • Les supporters de la chaîne sont multiples. Un premier groupe est constitué des acteurs qui fournissent les intrants et crédits pour la production, le stockage et commercialisation de l’oignon. Il s’agit des fournisseurs de semences, d’engrais et de produits phytosanitaires, des vendeurs de motopompes et revendeurs d’essence, des banques et IMF, des intermédiaires et des transporteurs. En plus de ces supporters, il existe toute une gamme d’autres acteurs qui gagnent leur vie à travers la prestation de services payants. On peut entre autres mentionner : la main d’œuvre agricole, les dockers et gardiens des centres de commercialisation, les femmes et enfants confectionneurs de chapeaux des sacs d’oignon, des charretiers et chameliers pour transporter l’oignon etc.
  • Les acteurs institutionnels concernent notamment les structures de l’administration publique (ministères, préfectures, communes, chefs coutumiers, douane, police, gendarmerie, services publics de recherche et vulgarisation, bureau de normalisation, etc.). Pour le cas de la filière oignon nigérienne, on observe que ces acteurs semblent se trouver ‘à distance’. Ils sont toutefois plus impliqués que l’on ne pense au premier vue.
  • Les intervenants et facilitateurs externes concernent surtout les bailleurs de fonds, les ONG internationales et les ONG et conseillers nationaux travaillant pour des projets de développement. Cette catégorie d’acteurs se donne un rôle public pour favoriser le développement socio-économique des zones rurales. A travers leurs décisions de financement et assistance technique, ils exercent une grande influence sur les orientations de développement de la filière d’oignon et l’appui effectif donné aux populations impliquées.

En observant cette diversité d’acteurs, il n’est pas surprenant que l’oignon crée beaucoup d’emplois directs et indirects. En effet, il y a plus d’un million de Nigériens, donc environ 10% de la population, qui vivent - au moins partiellement - sur la base des valeurs ajoutées par la filière.

Des systèmes de commercialisation informels et complexes

En aval de la chaine de valeur, les producteurs entretiennent des relations avec les intermédiaires, transporteurs et commerçants d’oignons. Les systèmes de commercialisation et d’exportation sont surtout informels. Le niveau d’implication formelle de l’Etat est faible. En fait, la filière oignon est largement autogérée à travers des conventions entre les acteurs commerciaux. Au besoin, ceux-ci s’arrangent avec les représentants des pouvoirs publics pour franchir toutes les étapes entre « la fourche et la fourchette », des villages de production jusqu’aux détaillants et consommateurs des villes côtières de l’Afrique de l’Ouest. Il existe toute une gamme d’acteurs commerciaux qui opèrent sur ces étapes : commerçants étrangers, cosignataires, logeurs, chefs de gare, intermédiaires titulaires et auxiliaires, intermédiaires et collecteurs villageois, transporteurs et camionneurs, grossistes et détaillants. Et pendant toutes ces étapes ces acteurs commerciaux créent des emplois, directement pour dockers, chauffeurs et gardiens et indirectement pour tant d’autres.

Les relations et transactions entre les acteurs commerciaux sont basées sur la confiance.

Des ressortissants nigériens résidant dans les principaux pays importateurs maintiennent par exemple des liens avec les grands centres de commercialisation des ceintures d’oignon importantes au Niger. Des commerçants étrangers se confient généralement aux mêmes logeurs ou intermédiaires principaux. Ces réseaux sont relativement fermés et connaissent des nœuds d’hommes influents sans lesquels il n’est pas possible de faire des transactions. Ils disposent des canaux de communication divers pour s’informer sur l’évolution de la demande et des prix à différents marchés dans la sous-région.

A coté de ce système de commercialisation « traditionnel » dominant, il y a des entreprises d’envergure qui se sont lancées dans la production et la commercialisation d’oignon (ASI-Wankoye, SAFIE). Celles-ci sont plus inclinées à utiliser des systèmes d’information de marché modernes, à se lancer dans la production contractuelle ou la production en régie, à investir dans le stockage moderne, l’ensachage, la labellisation et la transformation.

Elles sont sur l’Internet, prospectent de nouveaux marchés et savent aborder les partenaires au développement.

Des contraintes multiformes à lever !

Les contraintes au développement de la filière oignon sont principalement d’ordres, techniques, économiques et organisationnels.

Plusieurs variétés d’oignon sont produites au Niger, la principale étant le violet de Galmi. Cependant, Il est de plus en plus admis que la pureté génétique de ces variétés n’est pas certaine. Ce qui peut compromettre la diversification de l’offre sur les marchés et la labellisation de la ou des variétés souhaitées par les clients. La recherche pourra contribuer à lever ce doute en précisant les caractéristiques génétiques des différents écotypes et, par la même occasion, en permettant la production de semences de base certifiées.

Le Niger produit de l’oignon dans différentes zones agro-écologiques et à différentes périodes de l’année. C’est un atout très important pour occuper un marché, il faut l’approvisionner toute l’année. Cependant la production principale reste la culture de saison sèche avec une commercialisation en mars / avril. La période de raréfaction des oignons sur le marché de l’Afrique de l’Ouest se situe entre novembre et janvier de chaque année. Pour mettre de l’oignon sur les marché à cette dernière période il faut soit le conserver entre mai et octobre, c’est-à-dire lui faire passer la saison pluvieuse aux conditions de stockage les plus difficiles, soit produire en saison hivernale pour commercialiser dès octobre.
Aux plans organisationnel et économique, les entraves au développement de la filière oignon sont aussi nombreuses.

On observe de nombreux intervenants dans la filière, surtout en aval de la production, dans la phase commerciale. A ce stade, les acteurs sont nombreux, tant nationaux qu’étrangers et les transactions sont basées sur la confiance. Le fonctionnement et les résultats économiques de la filière ne sont pas bien connus et maîtrisés.

Des réseaux spécifiques se sont développés et ces derniers, relativement fermés, connaissent des acteurs influents sans lesquels il n’est pas possible de faire des transactions

Or, ils disposent de canaux de communication divers pour s’informer sur l’évolution de la demande et des prix à différents marchés dans la sous-région. Dans ce contexte, les producteurs font face à des frais de transaction élevés, causés par la méconnaissance du prix de marché, des préférences des clients et des conditions d’achat.

Par ailleurs, 80 à 95% de la production nationale d’oignons sont destinés à l’exportation et, aussi bien en amont qu’en aval de la production, il n’existe aucune organisation ni aucun mécanisme pour évaluer la dynamique et l’évolution du marché de l’oignon et de ses dérivés. Compte tenu de l’importance économique du produit, il est souhaitable qu’un mécanisme de veille informationnelle et de prospective sur cette dynamique et cette évolution soit mis en place pour s’imposer dans la régulation du marché.

Source : Eplucher l’oignon - Un projet de recherche-action de WUR-CDI, SNV-Niger, FCMN-Niya et Agri-Bilan
http://www.snvworld.org/sites/www.snvworld.org/files/publications/importance_de_loignon_s.pdf

Source : Amélioration de la productivité de l’oignon au Niger (Appel à propositions de projets de Recherche)
http://www.reca-niger.org/IMG/pdf/OIGNONSvcf2.pdf