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Assurer la durabilité des Hommes pour dynamiser et pérenniser l’agriculture familiale

L’agriculture familiale repose essentiellement sur deux piliers, l’exploitation agricole et la famille et est caractérisée par la relation étroite qui existe entre les deux. La durabilité de ce type d’agriculture dépend ainsi de celle de l’activité agricole, mais surtout de celle des Hommes.
La durabilité des hommes fait allusion à celle des acteurs qui contribuent au fonctionnement et au maintien de l’exploitation agricole familiale.

Quels sont les acteurs de l’exploitation agricole familiale au Sénégal ?

- Le chef de l’exploitation : qui est souvent représenté dans nos sociétés par le chef de famille. Il représente le centre décisionnel de l’exploitation. La vieillesse de cet élément central constitue une contrainte majeure à la bonne marche des activités de l’exploitation et donc à sa durabilité. Il est donc nécessaire de faciliter le renouvellement continu des chefs d’exploitation à travers l’installation des jeunes dans l’agriculture.

- les moyens humains de l’exploitation : composés du groupe familiale (ensemble des personnes contribuant directement ou indirectement au fonctionnement de l’EFA), du groupe de consommation (ensemble des personnes qui vivent et dépensent d’une manière habituelle sur le budget de l’exploitation) et du groupe de travail (ensemble des personnes qui participent aux activités agricoles et pastorales de l’exploitation). Face au phénomène d’exode rural qui menace le maintien de ces différents groupes au sein de l’exploitation agricole familiale, la durabilité des moyens humain repose sur le développement de politiques articulées et transversales qui permettraient de fixer les jeunes dans le monde rural.

- Et enfin les leaders du mouvement paysans sénégalais : qui agissent à un niveau plus élevé. Ces travailleurs de l’ombre, à travers le Conseil National de Concertation et de coopération des Ruraux (CNCR) ont fait de l’agriculture familiale leur cheval de bataille. En effet, depuis sa création en 1993, toutes les actions du CNCR concourent à asseoir un environnement socio-économique propice au développement des exploitations familiales agricoles ; d’où son slogan « Pour nourrir le pays, misons sur les exploitations familiales agricoles et appuyons les ! ».

La durabilité de ce type d’agriculture au Sénégal est étroitement liée à celle du mouvement paysan. Il s’avère donc impératif de créer les conditions pour la durabilité de ce mouvement paysan.

Comment assurer la durabilité du mouvement paysan ?

La réponse à cette question fondamentale pour le CNCR est partie d’une recommandation du Réseau des Organisations Paysannes et de Producteurs de l’Afrique de l’ouest –ROPPA- en 2006, à l’effet de créer un espace réservé aux jeunes dans ses différentes organisations membres. Les six années qui ont suivi ont démontré et confirmé au CNCR le bien-fondé de la recommandation du ROPPA et, le 27 juillet 2012 le collège des jeunes fut créé.

C’est un espace de réflexion et de concertation ouvert aux jeunes producteurs. Il constitue également un lieu d’apprentissage pour la jeunesse paysanne, condition sine qua non pour préparer une relève avertie. Conscient de cela, le Collège donne une importance capitale à la formation de ses membres.

Cependant préparer une relève requiert bien plus que des sessions de formation classiques. Raison pour laquelle un important programme appelé « Ndiangaane » a été lancé en juin 2013. Celui-ci vise, à travers l’approche du mentorat, à former et préparer les jeunes à devenir de bons acteurs du mouvement paysan sénégalais en développant en eux les valeurs d’un bon leader. Cela devrait permettre également de renforcer les liens qui existent entre les jeunes paysans et leurs ainés. Les séances de discussions et de partages bilatéraux devraient permettre aux jeunes de renforcer les liens qui existent entre eux et leurs ainés et de comprendre les fondations du mouvement paysan, développant en eux un sentiment d’appartenance plus fort.

PROGRAMME DE MENTORAT « NDIANGAANE » DU COLLEGE DES JEUNES

Littéralement, « Ndiangaane » signifie apprentissage. Le programme « Ndiangaane » tente, à travers une réflexion innovante de former les jeunes sur les valeurs incarnées par les leaders du mouvement paysan afin qu’ils puissent se les approprier d’une manière efficace. Le programme se base sur le concept de « mentorat ».

C’est par l’entremise d’une relation de confiance qui perdure dans le temps, soit pendant 12 semaines, à raison d’une heure par semaine, que le mentor (le leader) pourra expliquer, former, soutenir et encourager le mentoré (le jeune) dans la compréhension du mouvement paysan et lui inculquer les attitudes et les comportements nécessaires pour devenir un bon leader.
Chaque Jeune du collège est jumelé avec un mentor bénévole (travailleur adulte ou retraité actif du CNCR ou de ses fédérations membres) le plus proche. Le jeune mentoré rend chaque semaine une visite d’une heure de temps au mentor dans son lieu de travail pour des échanges.

Rôle du mentor

Le mentor est une personne d’expérience qui possède l’assurance et la sagesse qui l’incite à valoriser le transfert de ses acquis à d’autres personnes moins expérimentées. Il est motivé et disposé à partager ses connaissances, ses compétences et sa vision de la vie avec un plus jeune afin de le soutenir dans la réalisation de ses objectifs personnels et professionnels.
Le mentor doit être un leader du mouvement, une personne engagée, motivée et bien imprégnée de l’origine et des réalités du mouvement paysan. Il aura la noble tâche de transmettre ses savoirs et ses connaissances mais surtout des valeurs au jeune mentoré.

Rôle du mentoré

Le mentoré est une personne qui désire cheminer, apprendre et se développer et qui est motivée à accueillir des connaissances, des habiletés, des valeurs, des qualités relationnelles et de réflexion partagées avec un mentor et les transférer dans sa pratique pour mieux atteindre ses objectifs personnels et professionnels.

Le mentoré doit être un jeune membre du collège des jeunes du CNCR. Il doit être à l’écoute et se comporter en apprenant, donc être capable d’écouter et de synthétiser l’information reçue.

Les objectifs du programme peuvent être répartis en trois catégories :

- former les jeunes pour une appropriation des valeurs des mentors : leur inculquer déjà les valeurs d’un bon leader du mouvement : en terme de connaissance, de discipline, de comportement, d’attitude, de démarche, et de capacité de négociation et de réflexion.

- développer les liens entre jeunes et leaders du mouvement et les associations : De ce fait dans l’avenir, si les jeunes auront besoin de quelque chose, ils sauront à qui s’adresser.

- Lancer le processus de la relève pour assurer la durabilité du mouvement paysan : En effet parmi les jeunes, y a de futurs dirigeants que ce programme peut aider à identifier et à préparer à cette tâche.

Cette première édition a connu un important succès du point de vue apprentissage et capitalisation. Dix jeunes paysans (cinq jeunes femmes et cinq jeunes hommes) ont ainsi été formés sur les organisations paysannes et le leadership paysan. Au sortir de cette première édition, le Collège des Jeunes entend partager, avec les organisations paysannes de la sous-région, ce nouveau concept qui constitue un paradigme d’apprentissage différent des sessions de formations classiques qu’on a l’habitude de voir. Il permet d’assurer la durabilité des hommes dans le mouvement paysan sénégalais et donc la durabilité de l’agriculture familiale au Sénégal.

El hadji Babacar Samb

Volontaire CECI/UNITERRA, Conseiller en développement agricole et d’affaires,

Conseil National de Concertation et de Coopération des Ruraux (CNCR)

Collège des jeunes du CNCR

elhadjibabacarsamb@gmail.com